Les Mots chantant

Les Mots chantant

Les Bouches, Partie 3, du recueil Extraits de vies

Le 26 mai 2016,

 

Les Bouches

 

Le vent est doux et léger. Juste ce qu'il faut pour ne pas avoir chaud. Je me pose sur le balcon, musique dans les oreilles. Je n'ai pas envie d'entendre les bruits de la circulation. Je regarde le ciel, il est bleu, parsemé de nuages blancs quasi transparents. Je regarde l'horizon, des collines vertes à perte de vue. Quelques avions passent au loin. Le vent fait danser les arbres. Une danse reposante. Les oiseaux volent devant le balcon, le chat joue avec un insecte sur le sol. Le chien dort à mes pieds pendant que j'observe le monde. J'attends comme toujours.

Certains diront que je dors éveillée, je ne suis pas de ceux qui dorment debout. Certains diront aussi que je ne vois que le côté négatif, je ne suis pas de ceux qui voient la vie en noir. Je suis lucide. D'autres penseront que j'en demande trop, je ne suis pas de ceux qui exigent. D'autres encore penseront que j'agis avec faiblesse, je ne suis pas de ceux qui sont faibles. Ce que j'ose prendre, je le rends et bien souvent je donne toujours plus que ce qu'on me rend car bien souvent on ne me rend ou donne rien. J'avance toujours avec force, une force non destructrice. C'est la force tranquille. Certains diront que je suis trop gentille ou trop douce, je ne suis pas de ceux qui aiment la violence et pourtant je ne suis pas de ceux qui sont lâches. Certains diront aussi que je suis hautaine, je ne suis pas de ceux qui montrent leurs émotions. C'est ma définition de la dignité. Et d'autres diront alors que je cache bien mon jeu, je ne me montre pas car je suis mauvaise ; je ne suis pas de ceux qui jouent et cachent leur jeu. C'est ce que j'appelle la franchise, j'aime être directe. Avec moi pas de temeniques, si je ne parle pas c'est que je n'ai rien à dire. D'autres encore diront que je suis instable, je ne suis pas un modèle de société. Pour eux, je ne possède rien alors je ne suis pas fréquentable. Pour moi je suis riche de ce que la vie me donne, je me fiche du matériel, je me fiche qu'on me fréquente. Je choisis mes amis et cela me suffit.

Ils diront que je suis trop méfiante, et ils auront raison. N'entre pas dans mon monde qui veut. Quand je tends la main, il faut savoir l'attraper. Ils diront que je suis fière, et ils auront raison. Jamais je ne parle des vrais problèmes, je cherche toujours à les résoudre seule ; rarement je parle de mes sentiments, souvent je les gère seule. Ils diront aussi que j'ai une haute estime de moi-même, j'essaie d'être sincère, j'ai ma conscience pour moi, je ne pose pas de gestes que je n'assume pas. Je n'aime pas mentir, je n'aime pas tricher ; je suis un être humain, capable de mentir, capable de tricher, capable du bon comme du mauvais. Portée par mon libre-arbitre, dans mon monde qui semble silencieux, je réfléchis, je questionne, mon esprit tourbillonne. Enfin, ils diront que je suis tel un ermite, si seulement ils avaient raison. Qui me connaît vraiment ?

Je n'irai pas à l'encontre de ces bocche qui parlent sans arrêt. Moi, j'observe et j'écoute, jamais je ne juge ou condamne. Je m'efforce de comprendre. Des pleins de bouches qui sont pleins de bouches, quand la langue se détend de trop, elle finit par pendre, dirait-on chez moi. Si ce n'est que parler delle bocche che parlano sempre - des bouches qui parlent sans cesse - c'est être de ceux qui disent.

 

Priscilla



01/06/2016
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