Les Mots chantant

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Le Juke-box de Maria, Partie 2 L'Instant présent, du recueil Extraits de vies

Le Juke-box de Maria

 

Grazie a Maria T. per avere diviso con me i momenti più belli della Sua vita, grazie per il Suo sorriso e la Sua cortesia.

 

-Ciao Priscilla, come stai ?

-Ciao bene grazie e Lei ?

-ba va bene va bene, vuoi un caffè Priscilla ?

-Si, grazie

 

Ce n'est pas la première fois que je me rends chez Maria. Elle vit dans le village de Faeto, village perdu dans la Région des Pouilles. Pour la première fois elle me propose de visiter sa grande maison. Maria vit seule, son mari est décédé d'un cancer il y a environ dix ans. Elle a deux enfants mariés et elle est grand-mère de trois petits-enfants. En me montrant sa maison, elle me parle de sa vie. Orpheline de mère, elle s'est mariée à dix-huit ans. Son mari l'a emmenée en Suisse, il y sont restés de nombreuses années, sa fille est née là-bas. Puis ils sont revenus à Faeto, riche d'un savoir, d'une expérience : ceux de l’hôtellerie et de la restauration. A Faeto, ils ont ouvert un bistrot. Elle me montre la chambre de sa fille, celle de son fils et les pièces de la maison où elle a gardé certains objets qu'elle n'a pas le cœur à donner. À la mort de son mari, Maria a donné bon nombre de ses meubles à des familles pauvres. Des meubles qu'elle a entretenu avec le plus grand soin pendant des années. Elle a aussi donné de la vaisselle.

 

-Ho dato tutto Priscilla, tutto, tutto, tutto. Sono sola che cosa devo fare di tutto questo, non ne volevo più, ho dato tutto1.

 

Maria me raconte comme elle était heureuse avec son mari. Leurs meilleures années ont été celles où le bistrot était encore ouvert. Elle se souvient bien de cete période: le bistrot était toujours plein, rotisserie, pizzeria, tout le village y allait. L'ambiance était chaleureuse, conviviale, on riait, on parlait et certains confiaient leurs secrets à Maria. Secrets qu'elle a toujours gardés. Elle me montre les quelques photos qu'elle a gardé de cette époque, Maria me montre aussi les factures des dernières années. Quand son mari est décédé, Maria ne voulait pas fermer le bistrot mais à elle seule, elle ne pouvait pas le garder ouvert. Ses enfants n'ont pas voulu reprendre l'affaire avec elle. C'est avec une grande tristesse qu'elle l'a vendu.

 

-Mia filglia non voleva, aveva il bambino, era piccolo Priscilla, non poteva aiutarmi. Mio figlio non voleva, e che cosa dovevo fare Priscilla ? Io, da sola, non potevo allora ho venduto, ho chiuso tutto !2

 

Dans l'une des pièces de la maison qu'elle n'utilise plus, elle me montre un objet qu'elle affectionne énormément. Le juke-box de son bistrot. Elle retire le drap qui protège le juke-box. Ses yeux sont remplis d'émotions. Elle sourit.

 

-Vuoi ascoltare un po' di musica Priscilla ?3

 

Elle branche le juke-box, cela fait longtemps qu'elle ne l'a pas utilisé.

-Non mi ricordo come funzianna, ah…4

Au bout de quelques minutes elle parvient à le mettre en marche.

 

-Ah ! Guarda Priscilla ! Che cosa vuoi ascoltare ?

-Come vuole !5

 

Elle lit les titres des chansons. Elle m'explique que les chansons n'ont pas été changées depuis la fermeture du bistrot. Je m'attends à un morceau italien. Elle choisit. The Power of love de Céline Dion. Je souris. Maria semble heureuse, elle suit le rythme de la chanson et chante. Elle augmente le volume, se retourne et ouvre les portes-fenêtres. Il balcone donne sur la Via Margherita, une des rues importantes de Faeto. Maria appuie ses bras contre la rampe en souriant, je me place à coté d'elle.

 

-Tutti vanno a chiedere : ma che succede alla Maria ? È la festa ?6

 

En ce début du mois de mai, il y a un doux soleil sur la commune la plus haute des Pouilles. Maria salue de son balcon les quelques personnes qui passent.

De tout mon séjour, c'est probablement l'un des plus beaux partages qui m'a été offert. Nous avons écouté la musique pendant une heure. Nous ne parlions presque pas.

Maria m'a ouvert la porte de sa maison et celle de ses plus beaux souvenirs. Le bonheur qu'elle a connu pendant ces années là, elle me l'a transmis en allumant son juke-box.

 

1J'ai tout donné Priscilla, tout, tout, tout. Je suis seule qu'est-ce-que je dois faire de tout ça, je n'en voulais plus, j'ai tout donné.

2Ma fille ne voulait pas, elle avait déjà le garçon, il était tout petit, elle ne pouvait pas m'aider. Mon fils ne voulait pas, et qu'est-ce que je devais faire Priscilla ? Moi, toute seule, je ne pouvais pas alors j'ai vendu j'ai tout fermé.

3Veux-tu écouter un peu de musique Priscilla ?

4Je ne me souviens pas comment ça fonctionne, ah...

5-Ah ! Regarde Priscilla ! Que veux-tu écouter ?

-Comme vous voulez !

6Tous vont se demander : mais qu'est-ce qui lui arrive à Maria ? C'est la fête ?



13/07/2015
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